Article RCF – 02/04/2024
Le 2 avril, c’est la Journée Mondiale de Sensibilisation à l’autisme et aussi l’ouverture d’un 22ème Café Joyeux à Marseille. Café Joyeux a pour mission d’accueillir au sein de leurs cafés-restaurants, des personnes en situation de handicap. Le fondateur, Yann Bucaille-Lanrezac, était l’invité de la matinale. Il explique l’importance de l’inclusion des personnes porteuses d’autisme dans le monde du travail.
Le premier Café Joyeux ouvrait ses portes il y a six ans. Employant des personnes avec autisme ou porteuses de handicap, la possibilité d’avoir un travail leur ouvre des portes : ouverture sur le monde et insertion dans la société trop souvent indifférente.
Les cafés Joyeux, une manière de changer le regard sur le handicap
« Dans un monde où sur le plan économique, on cherche toujours la performance, on va exclure des personnes sous prétexte qu’elles sont un peu différentes. Et quelque part, on ne leur donne pas leur chance », insiste Yann Bucaille-Lanrezac. Les personnes porteuses de handicap sont deux fois moins en emploi que le reste de la population. Le fonctionnement économique de la société peut exclure les personnes handicapées, car elles n’apporteraient pas de valeur ajoutée à l’entreprise. « C’est peut-être cette société économique qui porte un handicap, j’ai envie de dire, qui rajoute du handicap au handicap », confie le fondateur des Cafés Joyeux.
« L’argent n’est qu’un outil et ne doit pas être une fin en soi. «
Café Joyeux a pour but de « montrer à des entrepreneurs qu’ils peuvent recruter des personnes en situation de handicap ». Certes, ce mouvement est un défi économique : il emploie aujourd’hui près de 300 salariés. « Notre objectif, ce n’est pas de faire du profit, mais de viser l’équilibre. C’est une exigence que d’employer 60 à 70 % de personnes avec autisme, troubles cognitifs et trisomie 21 », affirme Yann Bucaille-Lanrezac. Il adopte finalement une autre vision de l’entreprenariat, une vision plus humaine et solidaire. « Arrêtons de raisonner totalement rentabilité et performance, arrêtons de raisonner toujours plus TRI (Taux de rentabilité interne). Aujourd’hui, on a des maîtrises qui s’appellent par exemple le TRH (Taux de Richesse Humaine) ». Il serait en effet plus intéressant de parler de richesse humaine plutôt que de parler d’euros. D’après lui, « l’argent n’est qu’un outil et ne doit pas être une fin en soi ».
La mission du Café Joyeux
Cette entreprise a été créée en 2017 après que le fondateur, Yann Bucaille-Lanrezac ait fait une rencontre avec un jeune garçon porteur d’autisme lors d’une sortie en mer avec un groupe d’handicapés, une activité qu’il organisait avec sa femme. Il raconte que ce garçon lui demande un travail mais qu’il n’a rien à lui proposer. « Ce garçon me répond que ce n’est pas juste, il est handicapé mais il peut être utile« . Après ça, Yann Bucaille-Lanrezac crée un mouvement solidaire qui permet aux personnes porteuses de handicaps d’avoir un CDI, parfois certains le gardent à vie. « C’est très engageant, comme on dit en anglais, c’est un real commitment », explique-t-il.
Concrètement, l’entreprise cherche le vivre ensemble. « C’est une entreprise qui a un véritable impact social et qui répond à un sujet de société primordial, le travailler ensemble », affirme l’invité de la matinale. C’est une mission d’inclusion dans le quotidien surtout avec les clients des cafés. « La population aujourd’hui prend conscience et elle sait qu’il y a un véritable sujet de société », indique Yann Bucaille-Lanrezac. Café Joyeux cherche à valoriser la différence et la fragilité.
Employer une personne handicapée, quelles exigences ?
Employer une personne porteuse de handicap est un véritable ajout à une entreprise. Mais il est nécessaire d’être à l’écoute avec elle. « Ce qui prime ,c’est plus la manière d’être qu’un savoir technique. » Tout le monde ne peut pas travailler dans un café donc il s’agit d’adopter la bonne attitude pour encourager le travail et la confiance. « Mettre en doute une personne qui porte un handicap conduit tout de suite à un renfermement sur elle-même. Alors que je sais qu’elle est capable de bien faire », explique Yann Bucaille-Lanrezac. Les personnes avec des déficiences intellectuelles ou un handicap mental sont une vraie source d’inspiration pour ceux qui les entourent. « Leur force est de reconnaître leurs fragilités alors que nous, neurotypiques, nous sommes souvent incapables d’avouer nos propres faiblesses », reconnaît-il. Il s’agit d’une véritable force mise au service de l’entreprise mais aussi des nombreux clients.
Emission RCF L’Invité de la Matinale
Maguelone Peuchot – RCF